AVENIR » SANS UNE « JEUNESSE » (par Assane SARR)

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« AVENIR » SANS UNE « JEUNESSE » par Assane SARR

Encore, une décennie, l’Afrique sera dépouillée de sa richesse humaine. L’issue la plus favorable pour les jeunes africains, aujourd’hui, est l’Europe, malgré les mutations sociales et surtout économiques multiples et majeures auxquelles cette dernière est confrontée. Le continent africain est alors, au regard du monde entier, le continent dont la jeunesse est plus envoûtée par l’Eldorado inexistant. Cela peut s’expliquer par l’instabilité politique, l’insécurité, le chômage, la pauvreté, la mal gouvernance, le népotisme, la corruption, etc. qui, aujourd’hui, font que l’Afrique demeure dans un cycle interminable de sous développement.

Le rapport de l’Organisation Internationale des Migrations, à travers ses statistiques de l’année 2021, indique qu’en Afrique, au cours du premier semestre, 1146 personnes sont mortes en mer. A ce chiffre s’ajoutent les nombreuses pertes en vie humaines qui surviennent lors de la traversée risquée du desert saharien par les migrants.
En outre, entre la fin de l’année 2021 et celle de l’année 2022, d’autres âmes ont disparus sur les chemins de l’Europe, qui, aujourd’hui, est moins nantie.
Ce flux migratoire de la jeunesse africaine vers le vieux continent profite à qui ? Dans son ouvrage intitulé « La ruée vers l’Europe » [La jeune Afrique en route pour le vieux continent], paru aux éditions Grasset, en 2018, Stephen Smith declare : « La migration massive d’Africains vers l’Europe n’est dans l’intérêt ni de la jeune Afrique ni du Vieux Continent « . Toutefois, au regard du désespoir persistant et des nombreuses déceptions qui animent les jeunes dans le continent noir, l’offre européenne garde tout son intérêt aux yeux d’une jeunesse africaine désemparée, désorientée et en perte de repères. Cette série de voyages risqués vers l’Europe est loin de tirer son épilogue, si, aujourd’hui, nous nous fions aux chiffres des organisations en charge de la lutte contre ce phénomène. Selon le dernier sondage sur la Jeunesse Africaine (African Youth 2022), 52% des jeunes dont l’âge est comprise entre 18 et 24 ans, projettent d’émigrer dans un proche avenir.

Dès lors, L’illusion africaine consiste, pour ce continent, à songer à un développement sans sa jeunesse, qui, en effet, constitue sa force motrice. Cette énergie juvénile, mise au service du développement, peut permettre à ce continent de participer de façon dynamique à l’économie mondiale et de lancer irrémédiablement les rampes de son émergence.
L’Afrique se situe au centre de toutes perspectives, pour paraphraser Jean-Luc Buchalet et Christophe Prat, dans leur ouvrage: « Le Futur de l’Europe se joue en Afrique », publié aux éditions EYROLLES en 2019. Ces auteurs interpellent ce continent sur ses paradoxes et surtout sur le besoin impératif de réorientation de sa politique sociale et économique pour offir à ses populations un avenir radieux.

Aujourd’hui, l’Afrique se vide de ses poumons et s’accroupit devant le monde, à cause de la forte ruée des jeunes vers l’Europe, par tous les moyens, sous le regard impuissant des autorités africaines, demeurées sans solutions face à ce fléau. On se rappelle, en 2020, de la mort de 480 jeunes aux larges des côtes du Sénégal et récemment, de celle de 22 jeunes migrants maliens au large de la Libye, de l’histoire des vies qui ne seront jamais repêchées. Ces chiffres exploseront encore, tant que l’Afrique, à travers ses dirigeants, ne s’engage pas à élucider, d’une manière très réfléchie, cette problématique qui consume notre bombe démographique.

La question de l’émigration est certes mondiale, mais l’Afrique subit plus les conséquences démographiques et économiques. En réalité, il convient, sans, nul doute, avec une franchise irréprochable, de réactualiser cette question face aux autorités africaines, qui comprennent les enjeux et s’y mirent sans mot dire. Aujourd’hui, face à une mutation mondiale, il revient de réorienter cette jeunesse africaine. Cette dernière a des potentialités fortes et très actuelles, mais, laissée à elle même sans investissement par une classe politique peu soucieuse de leur avenir, elle cherche nécessairement refuge, malgré la fatalité, auprès du vieux continent dont le prestige demeure à travers son mythe.
Face à une telle jeunesse, la lutte contre le phénomène migratoire doit constituer une priorité dans nos politiques publiques. J’en appelle, à ce effet, à une meilleure prise de conscience des organisations et des associations mises sur pied partout en Afrique pour régler cette question, mais et surtout les États qui disposent de moyens dynamiques pour mieux diligenter cette question. Ainsi, dira t-on : « L’Europe n’est pas plus nantie que l’Afrique pour ceux qui connaissent la vraie valeur de la richesse ».

Assane SARR, Journaliste, Consultant Digital, Écrivain. Auteur de « PRÉMICES » paru en mai 2020 aux éditions Artige, de « EXALTATIONS » paru en mars 2022 aux éditions Fadiey, Co-auteur de « DE CRIS ET D’ENCRE » du Collectif Parlons Poésie paru en 2018 aux éditions Maîtres du Jeu.

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