CONTRIBUTION : Par El Hadji A Diallo  Coordonnateur du cadre de concertation des compagnies pétrolières pour la mise en œuvre de la norme ITIE au Sénégal.

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Quelles que soient les évolutions de la norme ITIE 2023, il faudra une transition énergétique transparente pour les uns, responsable pour les autres et juste pour le reste selon El Hadji Diallo de FORTESA,   Coordonnateur du cadre de concertation des compagnies pétrolières pour la mise en œuvre de la norme ITIE au Sénégal.

Une transition énergétique transparente pour les compagnies pétrolières internationales

L’analyse des stratégies climat des entreprises pétrolières et gazières au regard du scénario « Net Zero Emission by 2050 (NZE) » de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) démontre que leurs plans de production, flux de trésorerie et mix énergétique ne leur permettent pas de suivre une trajectoire 1,5°C. 

Soumises à une pression croissante, les compagnies pétrolières tentent de réduire les émissions de  CO2 générées par leurs activités, mais les résultats sont aujourd’hui mitigés. En effet dans leurs stratégies de mise en œuvre de leur plan climat et plan de gestion environnementale et sociale (PGES), certaines compagnies pétrolières internationales ont des pratiques commerciales peu transparentes qualifiées de « greewashing » par certains surtout par rapport à l’évaluation de leur emprunte carbone. En encourageant (non une nouvelle exigence) la publication de ces informations, la nouvelle norme ITIE 2023 gagnerait en pertinence et surtout par rapport aux engagements climatiques des compagnies pétrolières.

Une transition énergétique responsable pour les pays industrialisés

Le conflit ukrainien –russe, amène aujourd’hui les Européens à s’interroger sur leur souveraineté énergétique et sur la diversité de leurs approvisionnements. Face aux crises de fin de mois  avec la crise énergétique et les menaces climatiques; nous avons malheureusement l’impression que les pays européens ont fait leur choix en privilégiant la recherche de nouveaux fournisseurs de gaz naturel pour remplacer le gaz russe  au grand dam des accords climatiques ou de l’ « économie de vie » comme disait Jacques ATTALI économiste français .  La France avec la crise actuelle prévoit d’acheter du gaz de schiste aux Etats Unis alors que l’exploitation du gaz de schiste est interdite en France (la loi du 13 juillet 2011 interdit l’exploration et l’exploitation des mines d’hydrocarbures liquides ou gazeux (pétroles non conventionnels) par fracturation hydraulique). Avec toujours  la crise énergétique du gaz, la France est en train de réactiver et de repousser la fermeture de ses centrales nucléaires.et pour l’Allemagne ses centrales à charbon. Pour le voisin Allemand, il a décidé de compenser la baisse des livraisons de gaz russe, en  relançant ses centrales à charbon.

 Le volteface de BlackRock constitue une autre illustration . En effet le  premier gestionnaire d’actifs au monde, qui a mis à jour sa politique de vote en assemblée générale annuelle, pour les sociétés dans lesquelles il est investi. Dans une note, celui-ci prévient qu’il va réduire en 2022 son soutien aux résolutions émanant d’actionnaires pro climat, soumises en AG ces derniers jours.

Si des ONG appellent aujourd’hui les membres de l’ITIE à adopter de nouvelles exigences sur la transition énergétique, il serait risqué à notre avis pour l’institution de mettre en œuvre cette exigence vu le comportement et la posture de ses pays membres et industries partenaires.

L’attitude responsable pour les pays développés grands pollueurs doit être la sobriété énergétique, avec des modes de vie plus modérés et non la recherche effrénée de nouveaux partenaires producteurs de gaz. Et la véritable sobriété est une politique de la décroissance en réduisant leurs productions et leurs consommations pour limiter les dégâts sociaux et environnementaux.

Une transition énergétique juste pour les pays africains

L’Afrique ne peut pas se développer sans l’exploitation de son pétrole et son  gaz car ces revenus sont nécessaires pour  générer des fonds pour l’investissement dans les énergies vertes. Le continent dispose déjà d’un programme de « transition énergétique » destiné à transformer son développement énergétique dans le cadre de l’Agenda 2063 de l’Union africaine et de l’Accord de Paris sur le changement climatique. Mais la plupart des pays africains ne dispose pas encre de plan de transition.

La posture de plusieurs pays africains serait de privilégier une transition énergétique qui prend en compte les réalités africaines, dont le besoin en développement et l’accès à l’électricité(ODD7). Cette posture a davantage été amplifiée à travers une position commune africaine adoptée par l’Union Africaine en juillet dernier en prélude à la COP27 qui s’est déroulé en Egypte en novembre 2022.

Les politiques climatiques doivent s’aligner sur les priorités nationales. Dans un tel contexte, une exploitation juste des énergies fossiles se justifie pour les pays africains qui polluent moins (l’Afrique n’est responsable que de 3,8% des émissions totales de gaz à effet de serre) et qui aspirent à la croissance à long terme pour accéder au développement. 

Au moment où plus 600 millions d’africains n’ont pas accès à l’électricité,  la transition énergétique en Afrique doit donc reposer à la fois sur le gaz naturel, combustible fossile le moyen polluant, et les énergies renouvelables afin de faciliter l’accès généralisé des populations à l’électricité et d’atteindre  les objectifs de développement du continent (ODD7 et stratégie « gas-to-power »pour le Sénégal). La transition énergétique en Afrique fait face à des défis tels que le manque de financement, les contraintes techniques, les infrastructures insuffisantes, et surtout les obstacles politiques.

Le choix du Sénégal, qui s’est engagé à développer ses gisements de pétrole et de gaz naturel avec le   Président de la République, qui s’est ouvertement opposé aux efforts internationaux visant à limiter le financement du développement des énergies fossiles, est juste.  Le Sénégal travaille à l’élaboration d’une feuille de route pour une transition juste, dans le cadre de l’Initiative d’Action climatique pour l’Emploi. Les prévisions basées sur les données de l’ITIE à travers exigence  6.1 peuvent aider à traiter les implications économiques de la transition énergétique et fournir aux décideurs des éléments d’information leur permettant de bien gérer les risques de la transition.

Enfin nous pouvons affirmer sans risque de se tromper que le concept de « transition énergétique » en Afrique doit être revu pour qu’il soit adapté au contexte des pays, et l’équité et la bonne gouvernance sont essentielles pour une transition énergétique juste. Néanmoins, tous les pays doivent prendre de manière équitable et juste  des mesures  pour limiter la dépendance à long terme à l’égard des énergies fossiles en déclin et pour construire des économies de vie où les citoyens pourront s’épanouir dans un avenir à faible émission de carbone. Et le fonds d’aide pour le climat par ricochet pour les pays africains est légitime pour surmonter les défis, il doit être alimenté. C’est une démarche de correction et non de charité.

 

El Hadji A Diallo  de FORTESA,   Coordonnateur du cadre de concertation des compagnies pétrolières pour la mise en œuvre de la norme ITIE au Sénégal.

 

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