Ouvert hier jeudi au tribunal des référés de Mbour, le procès opposant l’association pour la défense, la protection et la sauvegarde écologique du site de Ndougouman et alentours au directeur général du Port Autonome de Dakar, celui des Impôts et des domaines et la société Dubaï Port World (DPW) au sujet du projet du port autonome de Ndayane, est mis en délibéré au 19 novembre prochain.
Les avocats de la défense, à défaut d’une décision d’incompétence du tribunal des référés, ont demandé au juge de déclarer les plaignants incompétents à se constituer partie civile. La partie civile, elle, par le biais de Me doudou Ndoye, parle d’une ignorance par la défense de la loi sur le domaine national. Dans leurs plaidoiries, les avocats de la défense, Maîtres Amadou Yakhya Fall et Moussa Konaté, ont dénié la qualité de résidents aux plaignants. Ils ont demandé au tribunal de se déclarer incompétent à juger cette affaire qui relèverait du ressort de la Cour Suprême selon eux.
A défaut, les conseils de la défense ont demandé au juge des référés de bien vouloir annuler la requête introduite par l’association plaignante au motif que celle-ci n’a pas qualité à se constituer partie civile dans cette affaire pour la simple raison qu’elle n’a aucune reconnaissance juridique. Pis, ceux qui se disent lésés par ce projet de port autonome à Ndayane ne seraient aucunement des résidents du site en question et seraient tout simplement détenteurs d’autorisations d’exploitation de périmètres agricoles. Après une passe d’armes qui a duré plus d’une demi-heure, le tribunal a pris la décision de mettre l’affaire en délibéré au 19 novembre prochain.
A la fin de l’audience, l’un des avocats de la partie civile, Me Doudou Ndoye, du Barreau de Dakar, en compagnie de Seydou Kaloga du barreau de Paris, a chargé la démarche des avocats de la défense.
Réaction de Me doudou Ndoye :« Nous nous opposons à la destruction de la vie de nos concitoyens »
« C’est le droit de chaque organisme, de chaque personne qui est appelé devant la justice, de se défendre. Et quand on se défend, on présente des arguments. Les avocats de ceux qui veulent construire le port ont le droit de présenter leurs arguments. Ils disent que nous n’avons pas le droit, pour le compte de ces personnes-là (Ndlr, membres de l’Association), de venir devant un juge. Nous, nous disons que le juge est le protecteur naturel de chaque citoyen. Le juge de Mbour devra trancher la question. Chaque juge qui est saisi doit trancher la question qui lui est présentée. Nous avons dit au juge de Mbour qu’il est compétent, c’est son rôle, son devoir de protéger la vie de tous les citoyens du département de Mbour. Je dis que, dans ce cas précis, ce n’est pas la Cour Suprême qui est compétente. Les autres me disent d’aller à la Cour Suprême, je peux bien y aller, je suis un avocat. Ceux qui me disent cela, je leur ai appris tous à aller à la Cour Suprême, donc ça ne me dérange pas de le faire. C’est que je suis à Mbour et il faut que le juge de Mbour me dise non, que lui ne protège pas Mbour. Lorsqu’il me le dira, j’irai bien à la Cour Suprême » a assené Me Doudou Ndoye.
« La Loi sur le domaine national est très mal connue …. »
Selon l’ancien Garde des Sceaux, son confrère qui a invoqué une telle disposition, fait tout simplement preuve de son ignorance de la loi sur le Domaine national au même titre que la majeure partie de nos concitoyens. « C’est parce qu’il ne comprend pas la Loi sur le Domaine national qu’il a argumenté de cette manière. La Loi sur le domaine national, telle qu’elle est conçue et écrite, est très mal connue et par tous les Sénégalais. Je crois que je peux avec autorité dire ce que je veux dire. Combien de personnes ont construit leur maison dans un champ et y habitent, combien de personnes ont construit leur villa dans un verger aussi bien en France, en Amérique qu’ici ? Les vergers sont faits pour être cultivés et habités par leur cultivateur. Donc, c’est sa résidence, qui est en même temps un verger », a expliqué l’ancien ministre de la Justice.
« L’important pour nous et pour l’évolution mondiale aujourd’hui, c’est que le droit des personnes commence à prendre le pas ou à atteindre ou à rattraper le droit des Etats. Le citoyen qui a été pendant longtemps oublié, dans la plupart des pays du monde, prend de plus en plus sa place dans la vie. Le droit à sa liberté, le droit à une vie normale, le droit à un environnement propre et sain, le droit à sa santé, que l’homme en tant qu’homme soit au cœur de tous les projets parce que sans l’homme il n’y a pas de vie. La terre est faite pour les hommes jusqu’à ce que Dieu en décide autrement », a indiqué celui qui se réclame de plus ancien officier du corps de la Justice au Sénégal, au sujet de ses attentes par rapport au délibéré de cette affaire prévu le 19 novembre prochain.
« Nous sommes là pour défendre et protéger les personnes qui seront impactées, qui seront dérangées en raison de la construction du port de Ndayane. Nous ne nous opposons pas à la construction d’un port, mais nous nous opposons à la destruction de la vie de nos concitoyens. Nous voulons qu’il y ait un équilibre entre les besoins de la communauté, les politiques d’Etat et les besoins de tous les citoyens, pour lesquels l’Etat doit faire sa politique. Nous invoquons le droit de l’homme » a fait valoir Me Doudou Ndoye.
Le Témoin